Depuis sa création en 2011, le fonds souverain marocain Ithmar Capital, présidé par Yassir Zenagui, conseiller royal et ancien ministre du Tourisme, peine à convaincre. Malgré une communication dynamique et un rôle de premier plan au sein de l’International Forum of Sovereign Wealth Funds et du Forum africain des fonds souverains (ASIF), Ithmar Capital cumule les déficits et affiche un portefeuille d’investissements qui n’a pas évolué depuis 2015.

Pour tenter de redorer son image, le fonds multiplie les annonces, comme la signature d’un accord de partenariat avec l’espagnol Cofides ou l’obtention d’une triple certification ISO. Cependant, ses résultats restent décevants : en 2018, sur un projet d’investissement prévisionnel d’un peu plus d’un milliard de dirhams (près de 100 millions d’euros), Ithmar n’a réalisé que 11,1 millions de dirhams, soit un taux de réalisation de seulement 1 %.

Un portefeuille limité et des bénéfices inexistants

Ithmar Capital, qui avait pour mission initiale de financer la stratégie touristique du Maroc, a changé de cap en 2016 pour devenir un fonds souverain multisectoriel. Malgré cela, son portefeuille d’investissements demeure essentiellement concentré sur des projets touristiques, avec seulement trois projets réalisés avant 2016. Le fonds n’a jamais enregistré de bénéfices et cumule les pertes depuis sa création, avec un déficit de 36 millions de dirhams en 2018.

Les prévisions optimistes d’Obaid Amrane, directeur général d’Ithmar Capital depuis 2019, n’ont pas suffi à redresser la situation. Les changements de gouvernance et de stratégie n’ont pas non plus permis d’améliorer les résultats du fonds, qui continue de susciter des interrogations quant à sa raison d’être.

L’avenir incertain d’Ithmar Capital face au Fonds Mohammed VI pour l’investissement

La création du Fonds Mohammed VI pour l’investissement (FM6I), doté d’un capital social de 15 milliards de dirhams (près de 1,4 milliard d’euros) et destiné à stimuler l’investissement privé dans des secteurs stratégiques, a soulevé des questions sur la vocation et l’avenir d’Ithmar Capital. Les missions des deux fonds souverains pouvant se chevaucher, certains estiment qu’Ithmar pourrait être amené à disparaître ou être intégré au FM6I.

La ministre des Finances, Nadia Fettah Alaoui, a récemment appelé à plus de clarté quant aux missions respectives des deux fonds. Selon une source au sein d’Ithmar, l’ambition du fonds se limiterait désormais à travailler en amont sur la préparation et la structuration des projets. Cependant, c’est Nadia Fettah Alaoui, en sa qualité de présidente du conseil d’administration des deux fonds souverains, qui aura le dernier mot sur l’avenir d’Ithmar Capital et la répartition des missions entre les deux fonds.

Enjeux et perspectives pour le secteur des fonds souverains au Maroc

La situation d’Ithmar Capital soulève des interrogations sur la gestion et l’efficacité des fonds souverains au Maroc. La création du FM6I, aux ambitions plus larges et doté d’un capital social nettement supérieur, montre une volonté de renforcer l’investissement dans des secteurs clés de l’économie marocaine. Toutefois, l’éventuelle disparition ou intégration d’Ithmar Capital au FM6I pourrait soulever des questions sur l’efficience et la transparence des fonds souverains dans le pays.

Pour assurer un avenir plus prometteur aux fonds souverains marocains, des efforts devront être consentis en termes de gouvernance, de stratégie d’investissement et de suivi des projets. Une meilleure coordination entre les différentes institutions et acteurs impliqués dans la gestion des fonds souverains, ainsi qu’une plus grande transparence sur leurs missions et résultats, pourraient contribuer à renforcer la confiance des investisseurs et à améliorer l’efficacité de ces instruments financiers au service du développement économique du Maroc.