Maroc: Les chiffres récemment publiés par l’Agence nationale des ports (ANP) sont sans appel : les importations de céréales ont augmenté de 23,2% en glissement annuel pour atteindre 8,8 millions de tonnes en 2022. Cette évolution est due en grande partie aux conditions climatiques défavorables qui ont entraîné une forte baisse de 67% de la production nationale des principales céréales (blé tendre, blé dur et orge) au titre de la campagne 2021/2022, dont le volume n’a pas dépassé les 34 millions de quintaux.
Cette situation, bien que prévisible, doit être analysée avec attention. En effet, elle témoigne d’une dépendance accrue aux importations de céréales, qui constituent pourtant un élément essentiel de la sécurité alimentaire du pays. Et ce n’est pas la concentration de l’activité de ces importations au port de Casablanca qui est de nature à rassurer : avec un volume de 4,7 millions de tonnes, soit environ 53,6% du trafic global des céréales, le port de Casablanca est devenu le point d’entrée quasi exclusif de cette denrée sur le territoire national.
Certes, les autres ports ont enregistré des variations plus ou moins importantes, à savoir Jorf Lasfar (+48,2%), Agadir (+32,9%), Nador (+32,9%) et Safi (+44,3%). Mais cela ne suffit pas à compenser la concentration excessive de l’activité de ces importations au niveau de Casablanca, qui est source de vulnérabilité pour l’approvisionnement en céréales du pays.
De même, la baisse de 20,5% du trafic des phosphates et dérivés, principalement due à l’évolution négative des exportations des engrais (-16,6%), du phosphate brut (-42,7%) et des importations du soufre (-8,4%) et de l’acide sulfirique (-39,8%), doit interpeller les décideurs. Car si les exportations de phosphates ont longtemps constitué une source importante de devises pour le pays, cette baisse de la demande internationale peut remettre en cause cette manne financière.
Enfin, l’augmentation de 9,4% à 11 millions de tonnes du trafic global des hydrocarbures est une évolution qui doit également être mise en perspective. Car si elle est a priori positive pour l’économie nationale, elle doit également nous rappeler que le Maroc demeure largement dépendant des énergies fossiles, alors même que l’urgence climatique nécessite une transition vers des sources d’énergie plus durables.
En somme, les chiffres publiés par l’ANP doivent nous amener à réfléchir sur la question de la sécurité alimentaire et énergétique du pays. Le Maroc doit en effet diversifier ses sources d’approvisionnement en céréales, tout en développant des alternatives aux énergies fossiles. Cela nécessite une volonté politique forte, mais aussi un engagement de tous les acteurs de la société pour mettre en œuvre cette transition indispensable pour l’avenir du pays.